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Ecriture sur les boites surprise

14 Janvier 2020

Textes des écrivants sur les boites surprises :

Claude : Et...Z’est parti !

« Aïe ! Ouille, ! Za alors ! Z’est pas compliqué de regarder où zon met les pieds ! »

Interdit, le promeneur s’arrête. Personne à l’horizon, la plage, baignée par un chaud soleil de juin est déserte.

« Oh, holà ! Zut de zut ! »

Il se baisse vers l’endroit d’où provient la voix, s’accroupit et ramène au creux de sa main une sorte de petit COQUILLAGE piaillant, gigotant, tout ensabler.

Il l’époussette avec soin :

« Espèce de mollusque, que fais-tu là, si loin de la mer ? »

« Ze vais te raconter : Ze baignais mollement, quand un petit voilier à mon côté paza, des pariziens, rien qu’à l’accent « Marie Zhantal » de la femme : - « Enfin mon zami, vous m’avez zarraché le bouton de ma ceinture, il est tombé à l’eau ! Mon zenzemble Dior est maintenant dépareillé. C’est…inzupportable ! » -

Et ...clop ! Un BOUTON COUTURIER de bon aloi, zute devant moi. Ze m’y blottis et ze m’azoupis. Ainsi bercée par le rezac, z’atterris zous tes godillots »

Le promeneur ébahi et charmé répond : « Je vois que les aiguilles de ma montre marquent 11 H, comme au bourdon de l’église. Pour me pardonner de t’avoir bousculé, nous pourrions aller « chez Jeannot » prendre un petit apéro. Qu’en penses-tu ? ».

« Z’est une exzellente idée ! Ze m’donne un coup de PEIGNE zur mon cheveu sur la langue et...z’est parti ! ». 

 

Dorothée : Trois plus un

De mes voyages

J’ai rapporté

De petits objets

Qui gardent le souvenir

Des bons moments passés.

Du château de Malbrouck

Une serinette

Qui joue à tue-tête

Une contine connue.

De Jersey,

Un porte-clefs

Avec dessus

Une vache grasse

À son cou une cloche

Qui sonne

De Grasse,

Chez Fragonard

Des senteurs

Parfums de fruits et de fleurs

Tous ces petits trésors dorment

Comme les santons

Dans leur boîte en carton.

Et voilà comment

Avec les ciseaux

J’ai découpé l'histoire

Que vous m'aviez gentiment tricotée

Pour recoller les morceaux

À ma façon !

Françoise : Surprise

Surprise

Yeux bandés

Je sens

Dans une boite en carton,

Un animal en plastique.

Deux oreilles pointues

Une queue en l’air.

Je ne le reconnais pas.

Surprise

Mon voisin identifie

Milou, le chien de Tintin.

Quelle sensibilité !

Surprise

Yeux bandés

Je touche

Un nœud papillon en soie.

C’est celui des deux Dupondt

Des histoires de Tintin

Attitude smart et

Comportement un peu stupide.

Surprise

Yeux bandés

Qu’est-ce que c’est ?

Un petit objet en métal

Rectangulaire et plat

Avec un anneau.

Mon voisin devine

Une clef USB.

Cela me permettra de mettre des photos

De souvenirs de lectures d’enfance

Les albums de Tintin !

Surprise

Yeux bandés

Je découvre

Une gomme,

C’est le dernier objet à identifier.

J’efface le mot" stupide"

Surprise

Je comprends que critiquer quelqu’un

Me bouleverse.

Pourtant je l’ai écrit ce mot

Quel mystère l’être humain !

 

Patrick : Poupée russe

Le commissaire arpentait les allées du marché de Noël, lorsque son regard fut attiré par une poupée russe qui lui rappela une affaire ancienne. Le dénouement en fut assez rapide, mais la personnalité du criminel allait le marquer à tout jamais.

« J’avais été appelé pour un triple crime. Madame Lasserre gisait, le corps lardé de coups de couteau ainsi que ses deux filles : Odette et Marie-Christine. Sa dernière fille, Laurence avait été retrouvée, blessée dans le parking souterrain de l’immeuble. Selon son témoignage, elle aurait été agressée par un homme cagoulé, qui lui avait porté un coup de couteau, mais elle avait réussi à lui échapper. Elle avait remis un élément de poupée russe que l’agresseur aurait laissé tomber.

Le lendemain, j’avais transmis au laboratoire un gant ensanglanté, trouvé non loin des victimes. Je demandais au « Profiler » la signification des quatre éléments de poupée russe, trouvé sur chaque cadavre : - « les figurines trouvées sur les corps s’emboîtent les unes dans les autres pour former un tout : une matriochka, mère en russe. Il faut voir dans ce crime, une sorte de refus paroxystique de se fondre dans le moule maternel. » -.

Je consultais la synthèse de l’enquête de voisinage : Madame Lasserre avait pris la direction d’une l’école de peinture, à la mort de son mari. Elle la dirigeait d’une main de fer. Odette et Marie-Christine, êtres frivoles, étaient chargées de la communication. Laurence, la benjamine, fréquentait l’école en tant qu’élève et son talent de peintre est reconnu. Elle avait une sensibilité à fleur de peau. C'était une sportive qui menait une vie quasiment monacale. Les voisins nous avaient fait part de disputes fréquentes, et violentes entre Madame Lasserre, Odette et Marie-Christine et Laurence. Mon adjoint avait eu l’idée, lors de la visite à l’école, de prendre plusieurs objets : couteau, tube de gouache, une boîte d’infusions et la tasse de Laurence afin de confronter les empreintes avec celle du gant. Aucune agression n’avait été filmée par les caméras du parking. En revanche les traces sur la tasse de Laurence correspondaient parfaitement à celle du gant perdu par l’assassin.

 

J’auditionnais à nouveau Laurence Lasserre. - « Il n’y a plus aucun doute sur votre culpabilité mademoiselle. Cependant je suis étonné, vous n’êtes pas une tueuse. Ceux et celles que je croise sont fiers de leurs crime, heureux d’expliquer par le détail leurs forfaits. Vous non. Vous paraissez subir vos meurtres. Il me semble que, seule, une haine puissante née d’une douleur indicible pouvait guider votre main… » -.

La jeune fille me regarda et dit d’un seul trait : « J’avoue le meurtre de ma mère, de mes sœurs, ainsi que ma fausse agression. J’en assumerai l’entière responsabilité. Vous n’obtiendrez plus de déclaration de ma part. »

Mademoiselle Lasserre tint parole et s’enferma dans un total mutisme malgré les exhortations du Président et de son avocat. Elle fut condamnée à perpétuité et ne fit pas appel. »

 

Le commissaire, tout en quittant le marché de Noël, se souvint qu’un souvenir pénible avait surgi, alors que la jeune fille partait menottée et encadrée par deux agents : Son père lui cinglant son dos d’enfant avec sa ceinture pour un mauvais carnet scolaire. Comme il l’avait haï. Il aurait fallu peu de choses pour qu’il soit à la place de cette femme.

 

Robert : Regarde

D’une main, pigmentée de lentigos, il secoue une ancienne boite d’allumettes géante sur laquelle, de part et d’autre, les grattoirs semblent moins rayés que lui. Sur le rebord de la cheminée, elle attendait la frilosité de l’automne.

À l’intérieur se heurtent des objets qui, dans un instant, bousculeront ses souvenirs. C’est alors qu’une voix familière d’enfant murmure : « Laisse-moi te montrer …Regarde le père qui se saisit d’une bûchette qu’il enflamme d’une simple friction contre le mur avant de la jeter dans l’âtre. La flambée illumine, réchauffe la maisonnée. »

 

Mais la flamme et les paroles s’éteignent. Le bonhomme revient à son écrin de carton illustré. Il l’ouvre, redécouvre. Le timbre de l’enfance se ranime. Cet accent, il le connait tellement bien :

« Regarde, la course au trésor d’un dimanche d’épiphanie.  Mon index, furtif, fébrile, creuse dans la brioche, recherchant le butin d’une fève en porcelaine. La première, pour moi, fut ce cœur à la base un peu étranglée. Comme un présage annonçant les coups de poing que la vie me donnera plus tard. Mais ce jour-là, seule la légèreté d’une couronne en papier doré pesa sur ma tête. »

 

L’ancien gaillard soupire dans le silence revenu, caressant machinalement deux morceaux de papier usés. Le murmure juvénile, tellement identique à celui qui était le sien autrefois, reprend : Regarde ces emballages de chocolat et de papillotes de Noël.  Regarde donc ces étuis fragiles, mordorés, que nous lissions avec soin avant de les glisser dans un livre de la bibliothèque rose. Notre monnaie d’échange contre une agate, un boulard, un malabar. »

 

Soudain les doigts du vieux rencontrent une petite cuillère. Le registre enfantin poursuit son inventaire : « Oh regarde, nos cuillères à moka. Celles qui arboraient les armoiries de Belfort, de Bayonne et de tant d’autres villes de France. Il a fallu en avaler de ce fromage crémeux, non par égard pour le calcium, mais parce que chaque boite nous offrait d’augmenter notre collection de blasons inoxydables. »

 

Le visage fripé frissonne lorsque, comme un écho de cette complicité trop tôt interrompue, s’élève le chuintement de ralliement utilisé par son frère afin de fixer leur attention sur un événement d’importance. « Regarde-les attentivement ces pièces de monnaie : lires, yens et deutschemarks. Ils nous viennent de l’oncle Lucien, ce voyageur émérite, un peu pingre, qui nous les distribuait pour nos étrennes. Mais nous, ça nous était bien égal, heureux que nous étions de posséder ce butin de flibustiers en herbe. »

 

Sous le coup de l’émotion, les vieilles paupières s’affaissent. Lorsqu’elles se rouvrent, la boite d’allumettes est fermée. Il sait pourtant bien, il en est persuadé, qu’il l’avait laissé ouverte. Et cette odeur de chewing-gum sucré qui s’invite dans ses narines…